Restitution du THINK Lab : Quelles compétences feront l’avenir de votre entreprise et/ou organisation ?

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Restitution THINK Lab 2024

Le THINK Lab by Montpellier Management

Le THINK Lab : de quoi s’agit-il ?

Un espace d’échange et de réflexion rassemblant des partenaires de l’écosystème, des enseignants-chercheurs et alumni pour émettre des propositions prospectives pour les entreprises. Accueillant une trentaine de participants, le THINK Lab travaille sur des thématiques annuelles au cours de séances d’intelligence collective où chacun contribue avec son expérience et son regard.

Pourquoi créer un THINK Lab ?

D’abord parce que l’université est dédiée à la construction de la pensée et de la réflexion ouverte et constructive à partir de débats d’idées. Lorsque la richesse des parcours de chacun rencontre le monde académique, il possible d’ouvrir des voies innovantes, qui feront progresser à la fois la connaissance et l’action concrète dans la cité.

En second lieu, la formation en management s’adresse au monde professionnel en constante évolution. Comment former les étudiants, sans prendre le pouls de ceux qui vont les recruter et partager leurs parcours professionnels ?

Le THINK Lab donne l’opportunité de rapprocher des mondes qui se côtoient sans véritablement se donner le temps de s’écouter et se comprendre.

Restitution THINK Lab 2024

Comment travailler ensemble ?

Le THINK Lab est bâti sur le principe de la co-construction : les temps d’échanges, de reformulation et de restitution partagée permettent de stimuler l’idéation tout en s’assurant de l’adhésion du plus grand nombre aux propositions.

THINK Lab restitution

Cet espace est le vôtre !

Quelles compétences feront l’avenir
de votre entreprise/organisation ?

Constats & Enjeux

Le premier quart du XXIème siècle est marqué par des changements profonds dans nos sociétés liés à des transformations technologiques, socio-culturelles, démographiques ou encore économico-spatiales. Leurs combinaisons marquent le pas vers une remise en question de ce qui fait la société. Ces transformations interpellent les organisations qui régulent nos relations dans leur raison d’être. La finalité de marché et de création de valeur glisse vers des dimensions plus globales face aux enjeux RSE. Les répercussions sur notre quotidien au travail sont majeures. Le THINK Lab a révélé l’expression d’attentes variées aussi bien pour les managers que pour les collaborateurs.

Une société en mutation

Depuis le siècle des lumières et l’accélération des innovations, notre société s’est engagée dans une dynamique permanente. Néanmoins, les dernières décennies sont marquées par deux signaux forts qui irriguent la société de nouvelles valeurs, modes de fonctionnement, en redéfinissant le rôle de l’entreprise.

Il s’agit d’abord de la transformation numérique qui atteint son paroxysme avec l’IA encore entourée d’un halo d’incertitudes quant à l’ampleur de ses impacts. Le numérique ne touche pas seulement nos pratiques, il a totalement bouleversé nos schèmes cognitifs, notre relation au savoir et au temps. Les contours matériels et opérationnels des organisations sont aujourd’hui questionnés. Le second marqueur concerne l’environnement climatique et énergétique qui témoigne des répercussions de l’activité humaine sur la planète manifestant des signes inquiétants de fragilité. Ce que certains appellent l’anthropocène place l’activité économique au cœur de la nécessité de changer de modèle.

Des entreprises/organisations en quête de sens

Moteurs de progrès, de croissance et de dynamique économique les entreprises vivent des transformations profondes dans leur fonctionnement opératoire. Mais leur finalité est également interpelée : dirigeants et collaborateurs n’attendent pas seulement (ou véritablement) de réussite professionnelle. Le SENS donné aux actions, sous-tendues par des valeurs communes sont mises en avant pour entrer puis rester dans l’entreprise. Les tensions sur le marché du travail ont accentué ce phénomène qui touche les corporate values des grands groupes, comme les micros entreprises.

Une vie professionnelle aux attentes multiples

Les temps de vie comme les cycles de vie recentrent chacun sur des aspirations personnelles et même intimes. L’importance accordée aux désirs individuels crée même un paradoxe avec la quête de sens

pour l’entreprise qui demande un engagement collectif. Cette crise de la vie professionnelle touche directement les compétences qui se construisent, évoluent et se transmettent dans un cadre professionnel stable pensé pour gagner en efficience et en efficacité. L’introduction des attentes personnelles, du bien-être au travail, du besoin de se réaliser poussent certains à changer de vie professionnelle remettant à plat toute la trajectoire de construction des compétences. Mais qu’entend-on par compétences ?

Restitution THINK Lab 2024

Les compétences

Elles sont définies à partir de compromis entre les salariés et les employeurs, adossées à des qualités personnelles et comportementales. Elles restent au cœur des débats académiques qui s’enlisent dans des résistances pour véritablement établir des indicateurs caractérisant les compétences (Scouarnec 2000 ; Segrestin 2004, Durand, 2015 ; Havard, 2022)¹.

Les membres du THINK Lab ont décidé de retenir une définition à partir de 4 piliers qui se combinent pour composer la compétence : savoir, savoir-faire, savoir-être et faire-savoir

Changements de la relation au travail

La relation implique le dialogue. Comment va évoluer le dialogue entre chacun d’entre nous et le travail ? Plus largement entre chaque membre de l’organisation et les différentes organisations professionnelles où il évolue ? Les systèmes relationnels comme les organisations et les entreprises ont changé de manière endogène, mais aussi parce que les modalités d’échange s’appuient sur des canaux et de outils (notamment numériques) qui les dénaturent. Surtout, les personnes qui portent les organisations ont étendu leurs attentent.

La quête de SENS domine les discussions parmi les membres du THINK Lab, sans pour cela faire l’unanimité. Tous s’accordent sur son importance dans les échanges et travaux d’aujourd’hui. Néanmoins, pour certains contradicteurs, ce n’est pas un sujet nouveau, alors que d’autres l’estiment secondaire à l’heure où collaborateurs et managers s’attachent davantage à des comportements hédonistes. Le groupe accepte que le sens couronne le schéma ci-dessous, que celui-ci soit connoté de manière philosophique ou qu’il se réfère à un sens plaisir et matérialiste. Il dépendra des valeurs de chacun et de la capacité à obtenir une convergence avec les valeurs collectives.

Le changement des conditions de dialogue s’explique de deux manières. La première, le déplacement de la rencontre entre les besoins des entreprises et les attentes de chacun d’entre nous vis-à-vis du travail. Le rôle du plaisir, les articulations des temps de vie, ou encore l’acceptation de l’effort sont des paramètres qui modifient l’ampleur de la place accordée au travail dans notre espace de vie. Les motifs cités sont aussi nombreux que variés : RTT, télétravail, distance lieu de travail/lieu de vie, surinformation, tensions sur le marché du travail… tous ces paramètres ont touché les rapports de force au sein des organisations.

De nouvelles trajectoires pour construire les compétences se profilent à la fois parce que les salariés expriment de nouveaux besoins, mais aussi parce qu’ils portent de nouveaux regards sur la manière de les acquérir.

Les nouveaux besoins émanent d’abord de la temporalité : les modalités d’acquisition des compétences sont liées à la force du lien à l’organisation. Celle-ci n’est pas uniforme au fil du temps. Il faut apprendre à connaitre les codes et assimiler la culture pour que l’attachement puisse se créer et acheminer vers une construction forte de compétences. Pour cela, une mise en perspective dégageant les enjeux liés à l’apport de chacun accompagné par un mentor ou une équipe sont nécessaires pour soutenir une posture positive à l’égard de la construction de compétences. D’un autre côté, le regard porté au cheminement vers la montée en compétences glisse vers davantage de pratique dès l’apprentissage en école pour former à la prise de recul. Par ce processus, la relation à l’échec est dédramatisée créant un terreau favorable au rebond. Enfin, ce niveau d’exigence et de paradoxes entre les désirs individuels et les besoins des organisations fragilise le sentiment d’appartenance en favorisant les comportements nomades.

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Vers de nouveaux modèles organisationnels ?

Finalement, n’est-on pas en train de mettre en place de nouveaux modèles chemin faisant, portés par des expériences empiriques ? Le métier de manager a évolué en résilience et agilité, pour répondre aux changements rapides. Les styles de management identifiés et enseignés depuis le milieu du XXème s’étirent vers des pratiques plaçant la confiance et la coopération comme socle de système davantage autogérés.

Vers une vision kaléidoscopique des compétences

Adossées à l’exercice du métier, les compétences ont longtemps été associées à la dimension opérative et productive directes. Aujourd’hui, le rayonnement des savoir/savoir-faire/savoir-être/faire-savoir prend de nouvelles dimensions avec la transformation du périmètre du travail. Les membres du THINK Lab ont notamment évoqué l’accélération et la séquentialisation de la construction du savoir (internet/tutoriels/réseaux), mais également la multi-localisation du travail qui impacte la délégation, l’animation jusqu’à l’autogestion (c’est-à-dire la capacité à savoir faire-faire par l’autonomisation des salariés). Finalement, apparait une multitude de compétences liées les unes aux autres, dont le décryptage pluriel dépend du moment, de l’enjeu, de la perception que l’on se fait. Difficile dans ces conditions d’établir une check-list standardisée.

S’ouvrir au monde, au savoir, pour des esprits critiques et créatifs

Le schéma ci-dessous montre comment les compétences s’inscrivent dans une dynamique sociétale : elles évoluent avec et par la société. Alors que les compétences ont longtemps été conditionnées par les besoins des organisations, leur raison d’être se lit aujourd’hui au niveau sociétal. Ce phénomène explique que certains s’autorisent des changements de vies en se lançant dans de nouvelles carrières, tandis que d’autres recrutent des collaborateurs « out of the box » pour stimuler l’innovation. Autant de comportements qui témoignent de trajectoires improbables pour vue qu’il y ait une cohérence de projet et pour certains même un sens dans la contribution que l’on apporte à la vie de l’organisation.

Ces bifurcations d’itinéraires, créent de l’expérience. Elles viennent enrichir l’horizon des compétences en captant des pratiques extra-sectorielles. L’inspiration se nourrit ainsi d’une connaissance élargie du monde, stimulant les esprits et par là même l’engouement pour l’innovation.

Le renforcement des compétences longtemps considéré comme un sillon qui se creuse par un travail régulier sur une trajectoire constante s’apparente davantage aujourd’hui à un élargissement du potentiel par des découvertes hors cadre.

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Des compétences plurielles et dynamiques

Au cœur du schéma ci-dessus siège la richesse des compétences, identifiée dans les groupes de travail du THINK Lab. Au centre du noyau, restent les compétences métiers. Mais elles évoluent et aboutissent à la contribution à l’organisation que par les « soft et mad skills » qui les entourent et les animent. On peut observer que celles-ci sont de différentes natures : peu d’entre elles concernent les traits de personnalité. La plupart émanent de profils qui se cultivent par des parcours de vie, des accompagnements personnels, le goût aiguisé pour l’écoute et l’entre-aide. S’inspirant des théories sur le leadership transformationnel, elles témoignent de managers et collaborateurs dont les compétences ne prennent corps que par l’humanisation des relations, la curiosité et la volonté d’aller de l’avant. En résumé, se connaitre soi-même, comprendre les autres, vivre et travailler ensemble.

Nous avions anticipé que le sujet que nous avons traité serait riche et complexe. Il nous a amené au-delà du périmètre de la vie professionnelle en questionnant nos représentations de la vie professionnelle et de sa place dans la société.

Au final, la première saison du THINK Lab de Montpellier Management a créé un groupe de réflexion et d’échange dans la bienveillance, entre des participants membres d’organisations très différentes. Nous aboutissons à un rendu qualitatif, que nous espérons aussi intéressant pour vous qu’il a été instructif pour nous. Chaque témoignage contribue à nous faire avancer au-delà de l’agréable moment que nous avons partagé ensemble. Merci pour votre présence chaleureuse et éclairée.

A l’année prochaine !

¹ Durand T. (2015), « L’alchimie de la compétence », Revue française de Gestion, V8 n°253, p 267-295.
Havard C. (2022), « Comment se construisent les compétences collectives de dialogue social dans une organisation : cadre d’analyse et étude de cas », Revue @GRH, V2 n°43, p 117-141.
Scouarnec A. (2000), Les effets sociaux des pratiques de gestion par les compétences, Thèse de doctorat nouveau régime, Université de Caen.
Segrestin D. (2004), Les chantiers du manager, Paris, A. Colin.

² J.H. Pestalozzi (1797), premier grand spécialiste de l’éducation s’attache à trois dimensions génériques : le savoir (connaissance), le savoir-faire (pratique) et le savoir-être (attitudes). Le savoir correspond à un ensemble des connaissances ou aptitudes acquises par l’étude ou l’expérience. Le savoir-faire s’adresse à la capacité à réaliser une tâche en visant des objectifs. Le rôle du tour de main dans la mise en œuvre du savoir-faire souligne l’importance de la dimension tacite dans l’apprentissage puis le perfectionnement. Le savoir-être fait référence aux attitudes et aux représentations des acteurs pour que s’assimilent les compétences. Pestalozzi préférait la notion plus large du « savoir-sentir ». Il évoquait ainsi l’assimilation individuelle comme un passage vers le développement personnel et l’accès à la liberté.

Mars 2024

Contact : moma-think-lab@umontpellier.fr 


14 mars 2024 : Moma-COM